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Norman Myers est un expert britannique des altérations environnementales dues au réchauffement climatiques. Son domaine d’expertise s’étend de l’organisation des systèmes écologiques et des éco-systèmes, au phénomène des extinctions massives, en passant par l’analyse du financement des questions environnementales, la consommation, la pauvreté, la sécurité environnementale -  qui engendre sa réflexion sur les réfugiés environnementaux - ou encore le développement durable et les nouvelles politiques économiques relais de croissance. Son travail le plus largement répandu, et qui a engendré le plus de critiques, concerne ses estimations quantitatives du nombre de réfugiés climatiques d’ici 2050. Bien que ses données puissent être remises en question par les experts contemporains sur la question de la migration environnementale, Norman Myers a joué un rôle prépondérant de lanceur d’alerte auprès des organisations internationales sur la préoccupation des migrations environnementales.

Norman Myers

“Aujourd’hui les réfugiés sont vus comme un problème périphérique, une espèce d’aberration qui perturbe l’ordre des choses”

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Sur le débat sémantique : “réfugiés environnementaux”

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Norman Myers définit les réfugiés environnementaux comme des personnes qui ne peuvent plus vivre en sécurité dans leur pays, à cause de la sécheresse, de l’érosion des sols, de la désertification et moult autres phénomènes environnementaux.  

Il propose cette classification :

1. non environmental cause

2. weak environmental cause

3. strong environmental cause

4. overwhelming (bouleversante) environmental cause

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En d’autres termes, Myers propose de classifier les réfugiés environnementaux en mesurant les intensités des causes qui ont motivé leur départ. Il s’est demandé à quel point le facteur de la dégradation de l’environnement était un composant nécessaire à la migration.  Mais cette approche nécessite des moyens budgétaires conséquents pour faire des enquêtes détaillées sur chaque migrants. Myers ajoute que les labels et leur tyrannie importe peu, car le problème à régler reste le même : accueillir.

 

Pour Myers, les déplacements environnementaux sont intrinsèquement liés à des raisons économiques. Avec l’exemple de l’Ethiopie et de l’Éritrée, il dit que la dégradation de l’environnement s’est manifesté via une sécheresse et une famine, preuve comme quoi une catégorie de réfugié peut en révéler une autre. La plupart du temps, les raisons de départ sont mêlées et les politiques tentent inexorablement de séparer l’inséparable. Il défend alors la multicausalité comme facteur de déplacement environnemental : un mélange entre « environmental push » (facteurs environmentaux) et « economic pull » (attractivité économique »). Les facteurs environnementaux à l’origine des déplacements peuvent être de plusieurs ordres :

1. Long term environmental degradation : sécheresse, désertification, déforestation, érosion des sols, pollution à grande échelle et réchauffement climatique

2. Les catastrophes naturelles : les cyclones, les tremblements de terre, les inondations.

3. Major environmental accidents : Tchernobyl

4. Development disruptions of environments : relocaliser des personnes à cause de la construction d’un grand barrage.

 

Selon lui, la pauvreté est fortement liée à la dégradation de l’environnement quoiqu’il arrive. La plupart des personnes concernées par des motifs flous de déplacements, qu’ils soient économique ou climatique, migrent à l’intérieur de leur pays ou dans des régions géographiques proches. Dans ces cas là, la labellisation de leur déplacement, économique ou climatique, importe peu. Pour lui la différence de termes tient surtout entre « refugee » and « migrant », dont la nuance s’établit selon si le motif de déplacement se mesure davantage à la pression environnementale ou à la décision individuelle liée aux opportunités économiques. Il établit donc 14 points de pression qui génèrent des réfugiés environnementaux : l’apatridie, la déforestation, la désertification, l’érosion des sols, la salinisation et l’engorgement des terres irriguées, la sécheresse, la pression agricole et l’insécurité alimentaire, la diminution de la biodiversité, la pression démographique, les maladies et la malnutrition, la pauvreté, les failles gouvernementales et les causes subsidiaires de migrations involontaires (comme les facteurs culturels, ethniques ou conflictuels classiques).

 

Sur la question de la quantification : 250 millions d’ici 2050

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Dans Environnemental Refugees in a globally warmed World (1993), Norman Myers estime les réfugiés climatiques à 10 millions, un nombre inférieur aux réfugiés liés aux autres causes (politiques, religieux et ethniques) mentionnées par la convention de Genève et dénombrés à 17 millions. Et encore, il estime ces chiffres moindre car c’est une catégorie encore non-reconnue. Par ailleurs, il évalue à 250 millions le nombre de réfugiés climatiques à travers le monde d’ici 2050.

Il cite les exemples du Bangladesh, de l’Égypte, mais aussi de la Chine et de l’Inde comme pays avec des niveaux côtiers suffisamment bas pour subir des catastrophes venants des eaux. Parmi d’autres : Indonésie, Thaïlande, Pakistan, Mozambique, Gambie, Sénégal et Suriname. Il cite Nicholls et Leatherman, ainsi que Jacobson (1990) et se réfère aux écrits de Vaught (1991) et Wilson (1989) pour l’estimation de la population vivant en zone côtière. Il estime qu’avec ces prédictions démographiques, l’Inde comptera 60 millions de réfugiés climatique d’ici 2050. Par ailleurs, il considère que les territoires insulaires sont menacés : les Maldives, Kiribati, Tuvalu et les Marshalls, plus une douzaine d’Etats situés dans les Caraïbes. En ce qui concerne les sécheresses, il fait référence au nord du Mexique, au nord du Chili, au nord du Brésil, à l’est de l’Argentine, le bassin méditerranéen, le Sahel et le sud de l’Afrique ainsi que des secteurs tropicaux d’Asie, des parties des USA, le sud du Canada, le sud de l’Europe et l’Australie.

Les chiffres que Myers avance sont nombreux, incertains et prédictifs, mais il maintient que cela relève d’une grande importance et que les divergences de chiffrement de réfugiés climatiques tiendra de la manière de les classifier. Néanmoins, Myers préfère être grossièrement juste plutôt que précisément faux. Il se demande pourquoi il faudrait attendre que la vérité scientifique émerge lorsqu’on traite un problème humain et pourquoi il y a tant besoin d’une évaluation théorique avant de passer à la pratique.

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Qui doit agir ? L’autorité internationale

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En 1989, Norman Myers était l’ambassadeur britannique des nations unies, statut grâce auquel il souhaitait porter l’attention sur le nouveau phénomène des réfugiés climatiques.

L’hostilité face à l’accueil de ces réfugiés se faisait sentir, pourtant, d’après lui, aucun pays ne peut lever les voiles hors de notre Terre, alors les territoires devraient rester solidaires. Ses articles sur les réfugiés environnementaux sonnent l’alerte auprès des institutions onusiennes, car Myers avance que la conséquence de l’élévation du nombre de réfugiés climatiques s’articulant autour de problème d’intégration et de cohabitation, révoltes sociales et économiques, problèmes ethniques ainsi que des  retombées politiques, vont apparaître.

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Comment agir ? Exporter des moyens ou accueillir ces personnes

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Norman Myers propose de ralentir le phénomène des réfugiés climatiques par l’investissement des pays développés pour combattre la malnutrition et la famine dans les pays les plus touchés. Parmi d’autres options que Myers envisage du côté des pays développés, il cite l’encouragement des investisseurs privés dans les causes environnementales ainsi qu’une réorganisation des efforts humains et budgétaires dans les secteurs tels que la médecine : une médecine davantage préventive que curative par exemple. L’objectif principal pour les pays développés comme pour ceux en voie de développement est de réduire les motivations des potentiels migrants environnementaux en leur fournissant des conditions de vie acceptables. Les démarches à suivre pour prendre en charge le problème sont dans l’ordre la reconnaissance, la compréhension et la solution.

Pour les pays développées, la perspective va devenir ambivalente : soit exporter les moyens de développement durable pour les communautés les plus vulnérables, soit importer un nombre grandissant de réfugiés environnementaux.

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Parcours

 

Norman Myers a obtenu une license en 1958 (B.A.) et un master (M.A.) en 1963 à l’Université d’Oxford. Il a ensuite poursuivi une thèse à Berkeley avant de recevoir les honneurs en recherche scientifique à l’université de Kent en 2003.

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Norman Myers fut conseiller des Nations Unies, de la Banque mondiale, de la commission européenne ainsi que de la Maison Blanche, plus de nombreuses académies scientifiques à travers le monde. Ses études et son expertise s’étendent sur une production prolifique d’ouvrages et de publications. De 1966 à 1969, il est auteur et journaliste indépendant, photographe et diffuser de la vie sauvage africaine. Il devient ensuite professeur à Nairobi au Kenya, puis membre de l’administration kenyane.

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Publications

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1987 : Population, Environment and Conflict. Environmental Conservation 14(1): 15-22 (award for best paper of the year).

 

1991 : Population, Resources and the Environment: The Critical Challenges. United Nations Population Fund, New York (French and Spanish translations, 1991).

 

1993 : Environmental Refugees in a globally warmed world: How Many Ahead? BioScience 43(11): 752- 761

 

1995 : (with Jennifer Kent) Environmental Exodus: An Emergent Crisis in the Global Arena. The Climate Institute, Washington D.C. (Italian translation, 1999).

 

1997 : Environmental Refugees. Population and Environment 18(5): 509-524.

2001k--Environmental Refugees. Encyclopedia of Global Environmental Change 3: 214-218. Wiley, Chichester, U.K.

 

2001 : Environmental Refugees: Our Latest Understanding. Philosophical Transactions of the Royal Society B: 356: 16.1-16.5.

 

2009 : (with Jennifer Kent) Forced Migration: The Environmental Underpinnings. Swedish International Development Authority, Stockholm (in prep).

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